
Incompétence d'une cour criminelle départementale en matière d’inceste : une faille de procédure révélée à l’audience
Le 19 juin 2025, la cour criminelle départementale de Seine-Saint-Denis devait juger un homme de 30 ans pour viols incestueux sur mineurs, agressions sexuelles incestueuses et corruption de mineurs. Pourtant, au cœur de l’audience, un élément déterminant a remis en cause la compétence de la juridiction : certains faits reprochés à l’accusé ont été commis alors qu’il était encore mineur.
La révélation intervient tardivement, bien que les dates de naissance du mis en cause et celles des infractions soient connues depuis le début de la procédure. Ce défaut de vigilance a conduit la cour à se déclarer incompétente, conformément au Code de la justice pénale des mineurs. En effet, l’article L. 231-9 réserve à la cour d’assises des mineurs le traitement des faits commis par un accusé alors qu’il n’avait pas atteint la majorité.
Une procédure relancée
Malgré la gravité des faits et l’émotion des victimes présentes, la cour n’a pu faire autrement que de constater l’incompétence. Il reviendra désormais au parquet de saisir la juridiction compétente, ce qui entraînera inévitablement de nouveaux délais. Le risque de prescription de certains actes et l’impact psychologique sur les victimes, déjà lourdement éprouvées, interrogent sur la qualité du traitement judiciaire de telles affaires.
Une faille évitable
Ce dysfonctionnement soulève des questions sur le suivi du dossier par l’ensemble des acteurs de la chaîne pénale. Ni les enquêteurs, ni le juge d’instruction, ni le ministère public, ni même la défense n’avaient relevé cette incompatibilité jusqu’à l’audience. Cette erreur de procédure manifeste aurait pu être évitée par une simple vérification chronologique.
Une question de droit interprétée
Si la défense a invoqué l’indivisibilité des faits pour maintenir l’affaire devant la cour criminelle, la partie civile et l’avocat général ont plaidé pour une dissociation des périodes. La cour a finalement retenu une lecture stricte du droit : la compétence est déterminée par l’âge de l’auteur au moment des faits, sans possibilité d’exception, sauf indivisibilité absolue, ce qui n’était pas démontré.
La justice devra donc recommencer une partie de la procédure devant la juridiction des mineurs, repoussant encore le moment d’une éventuelle réparation pour les victimes. Ce renvoi met en lumière la nécessité de rigueur dans le traitement des infractions sexuelles sur mineurs, où chaque étape procédurale est essentielle à la bonne administration de la justice.